Premier conseil des ministres franco-allemands à Metz

8 avril 2016

C’est un conseil des ministres très chargé qui se déroulait hier, à Metz. En plus des deux chefs d’Etat, 17 ministres français, dont le Premier-ministre Manuel Valls, et 17 ministres allemands était au rendez-vous. Les raisons données de ce déploiement tiennent au nombre important de sujets qui sont discutés en ce moment entre la France et l’Allemagne. Le thème central était les migrants et les réfugiés. Angela Merkel confirmaient le soutien des deux pays à la Grèce, mais avec un renforcement des contrôles à la frontière gréco-turque. Autre point concomitant : la protection des frontières extérieures de Schengen avec un affermissement de la politique de retour accompagné d’un soutien au gouvernement libyen pour lutter contre les migrants clandestins.

Dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, la chancelière et le président français notaient la nécessité de la mise en œuvre du PNR européen ainsi que le renforcement des échanges d’informations. Cela en assurant des contrôles systématiques aux frontières extérieures de la zone Schengen. Le contrôle des armes à feu et la lutte contre le financement du terrorisme découlant alors des démarches évoquées plus haut. Mais ils reconnaissaient aussi la nécessité de rapprocher les législations des Etats membres avec une coopération en matière de renseignement.

Le sujet central de ce sommet traitait donc aussi de l’intégration. Ceci dans le sens de l’intégration des personnes dans les sociétés puisque le président et la chancelière avaient confié au ministre des affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault et la ministre présidente du Land de Sarre, Annegret Kramp-Karrenbauer, la charge d’étudier les pratiques et les politiques dans les deux pays en matière d’intégration afin de rationaliser les réponses de ces deux pays qui n’ont pas une culture politique commune en ce domaine.

Economie et vie quotidienne

Visiblement, c’est par la quotidienneté que les deux élus désirent faire évoluer les choses. Ainsi, vis-à-vis de l’euro, Angela Merkel et François Hollande se disaient pour la préservation du modèle européen malmené aujourd’hui ainsi que la consolidation de la zone euro par le biais d’une véritable union bancaire. Cette consolidation se complétant par la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Le soutien à une taxe européenne sur les transactions financières était aussi au cœur des débats. Dans le secteur du numérique, la volonté des ministres s’affichait pour une plus grande protection des individus avec, en parallèle, la transparence des plateformes. L’on annonçait aussi ici l’installation d’une “conférence numérique franco-allemande” d’ici la fin de l’année. La France et l’Allemagne informaient également dans ce domaine de la création d’une Académie franco-allemande pour le numérique. Concernant l’emploi, l’apprentissage sera promotionné au sein des deux pays afin de créer un équilibre entre la France et sa voisine. Par ailleurs, la France et l’Allemagne souhaitent contribuer conjointement au développement de la conduite automatisée dans le secteur automobile.

La France et l’Allemagne ont encore signé lors de ce conseil un accord permettant l’emploi transfrontalier des aéronefs de police et la libre circulation des personnes et la mobilité des travailleurs sera assurée au sein d’un socle européen des droits sociaux.

Jean-Pierre COUR

 

Cette Europe qui manque de souffle

Selon l’entourage de la présidence de la République : “De telles journées sont essentielles et indispensables dans le contexte politique et économique actuel, non seulement européen mais mondial, si l’on sait en mesurer les enjeux réels et si l’on veut bien aborder le fond des problèmes en dépassant tous les clivages et les postures dépassées. C’est ce qu’on attend aujourd’hui des politiques, au plus haut niveau, mais aussi dans toute leur déclinaison de l’appareil d’État jusqu’au simple niveau local”.

Pour Philippe Richert, président de la région Grand-Est : “C’est bien que la France et l’Allemagne se reparlent. C’est le moteur de l’Europe… et cela nous facilite les choses, nous qui sommes frontaliers. C’est bien que l’on relance l’Europe. C’est bien pour tout le monde et il faut une vision, une volonté car cette Europe manque de souffle. Il faut que chacun prenne ses responsabilités. On a perdu beaucoup de temps. Pour construire, il faut se parler et arrêter de lancer chacun des initiatives qui ne sont pas suivies d’effets parce qu’il n’y a pas de compréhension réciproques. Ensuite, en travaillant ensemble, l’on pourra proposer des choses aux autres pays européens car de vraies solutions, pour les migrants par exemple, il n’y en a pas aujourd’hui !”.

L’essor des frontaliers

A Metz, l’envol des frontaliers dans une Allemagne proche manquant chroniquement de main-d’œuvre dans le futur se comprend comme une opportunité pour Metz et la Moselle. D’aucuns pensent, dans l’ancienne capitale lorraine, que les moteurs économiques dont Metz a besoin sont à chercher de l’autre côté des frontières, au Luxembourg et en Allemagne. De nombreux “navetteurs” le vivent déjà quotidiennement mais cette dépendance, de l’avis de nombreux entrepreneurs, va encore se renforcer. Selon L-F Reitz, spécialiste des métropoles européennes, lors d’une de ses conférence : “Au Grand-Duché comme en Allemagne, le nombre d’actifs va diminuer dans des proportions vertigineuses avec un déficit de 580 000 personnes dans les quinze ans à venir”.

Metz : la ville la plus allemande de France

Lobbying messin

Le mérite de ce rendez-vous de Metz en revient au maire socialiste de Metz, Dominique Gros, qui a fait du lobbying auprès de la présidence française. La chose n’est pas désintéressée puisque la ville postule à être classée au patrimoine mondial de l’Unesco et le maire de la ville compte bien, ici, sur le soutien du président de la République. Et puis, architecturalement, le Jugendstil (le style néo-roman rhénan) du quartier gare (la Neustadt construit pendant la présence allemande), ainsi que les mentalités font que cette installation à Metz pour le sommet franco-allemand rentrait dans la logique des choses. Ainsi, nombre d’Allemands considèrent qu’il est difficile de travailler avec des Français mais que la chose est plus facile avec les Lorrains. Toujours en raison de cette culture commune.

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