Cattenom sur le fil… électrique

21 décembre 2016

La centrale nucléaire de Cattenom fait le point sur sa pérennité.

En France, huit des douze réacteurs nucléaires français concernés par des anomalies de fabrication pourront redémarrer, sous réserve de prochaines vérifications, a annoncé lundi dernier l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Mercredi, une quarantaine de militants de Greenpeace bloquaient dès l’aube l’accès au siège d’EDF à Paris. Ils voulaient interpeller le groupe sur sa situation financière et sur les soupçons d’anomalies de fabrication sur certains réacteurs. C’est dans cette ambiance que se déroulait la conférence de presse de la centrale mosellane pour assurer au public les chiffres clés sur la sécurité et sur la sureté du site.

Grand carénage

Cattenom produit avec ses quatre réacteurs de 1.300 mégawatts chacun près de 35 milliards de kilowattheures par ans, soit huit pour cent de la production nationale française. C’est aussi une centrale qui paye 105 millions d’euros dont 56,7 millions d’euros qui sont versés directement au territoire local. Elle emploie 1.400 salariés et 500 prestataires permanents. Comme on le voit, c’est un outil industriel qui pèse son poids dans la sphère économique locale. Pour le “grand carénage” de l’unité de production 1 (il y en a quatre en tout), l’investissement d’EDF est de cent millions d’euros générant l’ajout de 3.500 intervenants pendant les cinq mois de travaux qui se sont clôturés le 25 octobre dernier. Ce “grand carénage” a fait appel à 115 entreprises prestataires.

Ici, Thierry Rosso, le nouveau directeur de la centrale de Cattenom nommé le 1er juin dernier expliquait que de nouvelles normes de sécurités furent apportées cette année comme le renforcement des protections contre les agressions externes vis-à-vis des séismes ou des inondations, le renforcement en appoint d’eau et d’électricité ou des systèmes de limitation de rejets en cas d’accident. Et investissement technique est réalisé pour faire survivre cette centrale jusqu’en 2046. Pour autant, le besoin s’en fait effectivement sentir puisque qu’un réacteur de la centrale nucléaire mosellane s’est mis à l’arrêt dans la nuit du week-end dernier suite à un incident. Les jours précédents les pompiers avaient déjà été appelés deux fois. Le jour même, une panne se déclarait dans la nuit : “Cela n’impacte nullement la sureté nucléaire”, assure Thierry Rosso. “Cela vient d’une fuite d’air dans une conduite sans contact avec le cœur du réacteur et les autres fois il fut détecté une odeur de fumée. L’arrêt immédiat fut donc automatique. Les pompiers sont venus mais sans intervenir. C’est bien ici la preuve de l’efficacité du suivi de la centrale. C’est catalogué au niveau zéro des incident par l’ASN. Pour notre part, nous déclarons les incident même de niveau zéro alors que même l’Allemagne ne le fait pas !”. Il notait aussi que de grands travaux sont en cours à la centrale suite à Fukushima avec le renforcement des protections “grands vents” et canicule.

Le feu et les soudures

Ce que l’on apprenait aussi, c’est que ce que craint le plus une centrale nucléaire est le feu. Deuxième préoccupation majeur pour le directeur de la centrale, le suivie des milliers de soudures des réseaux qui composent et habitent la centrale. C’est ici, selon lui “un soin de tous les instants”. Interrogé pour savoir si l’enceinte de confinement du réacteur garderait sont étanchéité dans les décennies qui viennent, Thierry Rosso répond : “Nous avons poussé la pression dans l’enceinte de confinement à 300 bars de pression au lieu des 155 bars normaux dans le circuit primaire qui est en contact avec le combustible nucléaire, et les tests ont été très satisfaisant. S’ajoute à cela que nous avons complété l’isolation sur 1.000 mètres carrés avec de la résine époxy et de la laine de verre du dôme du réacteur et nous avons aussi remplacé et modernisé la salle de commande de ce dernier composé de 19 km de câbles et 4.000 connexions électriques toutes vérifiées”.

Sur la question du risque terroriste, le directeur de la centrale se dit aussi très rassuré. Un peloton de Gendarmerie dignes des troupes d’élite stationne au sein de la centrale et il est installé aujourd’hui une défense en profondeur du site de la centrale dont la consigne brutale est : éliminer et effacer la menace. Autre méthode, le criblage de toutes les personnes qui pénètrent dans la centrale. Ici, même un journaliste du Point fut recalé, assure-t-il. Bien entendu, ce criblage s’effectue aussi, et à plus forte raison, avec le personnel qu’il soit d’EDF ou de sous-traitants.

Jean-Pierre COUR

L’avis officiel de l’ASN

L’Autorité de sûreté nucléaire, organisme d’Etat indépendant qui contrôle les centrales françaises, a exprimé son avis sur les derniers incidents à Cattenom : “Le 30 novembre 2016, l’exploitant de la centrale nucléaire de Cattenom a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire un événement significatif pour la sûreté relatif à l’indisponibilité d’un calculateur du système de protection du réacteur. Le système de protection du réacteur a pour principales fonctions la détection de situations anormales, l’arrêt automatique du réacteur et le déclenchement des systèmes de sauvegarde. Il possède deux voies redondantes, dits voie A et voie B, identiques et indépendantes. Chacune de ces deux voies suffit à remplir l’ensemble des fonctions de sûreté dévolues au système de protection. Le 27 novembre 2016, un opérateur identifie un défaut sur l’un des calculateurs de la voie A du système de protection du réacteur n° 2. Ce défaut a pour origine une panne sur une carte électronique et concerne un paramètre indiquant l’état de fonctionnement de la turbine. Ce défaut aurait pu entrainer la non mise en œuvre d’une partie des protections du réacteur de la voie A utilisant ce paramètre : l’un des ordres d’arrêt automatique du réacteur et deux ordres d’ouverture du contournement de la turbine vers le condenseur”. J-P.C

© photo J-P C.

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