Un aérodrome qui bat de l’aile

9 février 2017

Chambley Planet’air cumule au fil des ans les difficultés. Petit retour historique.

A six mois de la biennale “Mondial Air Ballons” qui se déroulera cette année du 21 au 30 juillet sur l’ancienne base de l’Otan de Chambley en Meurthe-et-Moselle, est-il encore possible de faire le point sur le futur de cet espace qui coûte un million d’euros par an à la région Grand Est auquel s’ajoute 630.000 d’euros pour chaque édition de cette réunion mondiale de montgolfières ?

En fait, depuis le 8 février 1958, la base de Chambley est mise en sommeil. Surtout depuis le départ définitif des Américains de cette ancienne base de l’Otan le 1er avril 1967. A présent, la pérennité de cet espace pèse sur les finances publiques sans qu’aucune stratégie de réemploi ne semble prendre racine. Après le départ de l’USAF, la base est d’abord rétrocédée à l’Armée de l’Air. Rattachée administrativement à la Base aérienne 136 Toul-Rosières, Chambley est alors utilisé pour des exercices. La base sert également de terrain de manœuvres pour les troupes aéroportées de l’Armée de terre. Autant dire, qu’elle devient une sorte de friche militaire dont le coût final de la dépollution pyrotechnique pour l’ouverture au public demeure encore confidentiel à ce jour. Plus ou moins 8 millions, selon nos sources.

Devenue propriété du conseil régional de Lorraine et aujourd’hui de la région Grand Est, ce “pôle d’excellence aéronautique et touristique” est inauguré en 2010 couvrant 500 hectares aux confins de la Meuse, de la Meurthe-Et-Moselle et de la Moselle. À la fois excentré par rapport aux grandes villes et central au cœur de la lorraine, “Chambley Planet’air” – C’est le nouveau nom – constitue un étrange village dont la station de gaz et d’essence constituerait le poste de garde et la piste d’aviation de 2.400 mètres de longueur l’artère principale. Le long du boulevard Saint-Exupéry qui jouxte la piste accueille aujourd’hui six grands hangars en bois. Les façades de verre et d’acier abritent des activités hétéroclites mais connexes, de l’atelier de réparation d’hélicoptères à l’auditorium du centre de formation. La tour de contrôle rénovée accueille désormais des bureaux et un restaurant, tout en conservant sa fonction de vigie.

No futur ?

C’est “no futur”, semble-t-il pour cette base, comme le disait le slogan punk. Et l’historique récent devient alors à la fois lourd et étrange. Ainsi, et d’une façon un peu farfelue, en 2007, on y construit en urgence un hangar pour le zeppelin de l’explorateur Jean-Louis Etienne… bien que ce dernier ne soit pas intéressé par le projet. Ce projet ainsi que les espoirs partiront donc en fumée tout comme le ballon de l’explorateur qui prendra feu dans le midi de la France. Mais le bâtiment est malgré tout construit ! Ce hangar de 26 mètres de haut, 60 de longueur et 40 de large coûtera tout de même à la Lorraine la modique somme de 2,7 millions d’euros pour rien. Tant pis, on accueille alors un homme d’affaire, Serge Bitboul, qui rêve de construire là un avion léger tout-terrain, le Skylander. A l’horizon 2012, plus de 300 emplois devaient se créer, plus 600 emplois indirects, assuraient les hommes politiques en 2009. En fait, sept jeunes ingénieurs restèrent sur place pendant deux ans puis partirent vers d’autres cieux. Là encore, échec. La facture pour la Lorraine fut cette fois de 21,7 millions d’euros en pure perte.

Aujourd’hui, deux secteurs composent l’emprise. Le premier servant pour les grands événements comme le Lorraine Mondial Air Ballons. Des associations d’ULM, de planeur, d’hélicoptère et d’autres activités aéronautiques y sont également logées. Le second espace est dédié à l’accueil des grandes animations ponctuelles organisées par la Région ou par des tiers. Un espace est toujours proposé pour les animations des associations lorraines, de type sportives, culturelles, ou de loisirs. Un circuit dédié aux sports à moteurs terrestres s’y installe. La tour de contrôle a été rénovée et dispose aussi d’un bar-restaurant. Bref, de l’espace est disponible… mais vide.

Une conférence de presse sur le Mondial Air Ballons s’est tenue cette semaine à Metz avec le président de la région Grand Est, Philippe Richert. Interrogé, ce dernier confirme que la région continuera à soutenir le Mondial Air Ballons dont le coût total est de 2,3 millions d’euros provenant à 30 % des collectivités et institutions dont la région à hauteur de 630.000 d’euros et à 60 % d’entreprises et 10 % par les inscriptions et redevances. Faisant suite à nos questions, Philippe Richert ne confirme pas que cet espace aéronautique participera au concept “d’espace central lorrain”, tant désiré par son prédécesseur J-P Masseret. Cet “espace central” devait à l’origine être composé de l’aéroport international “LorraineAirport”, de l’espace nautique de loisirs “Madine”, de la gare TGV de Cheminot et devait devenir une vaste zone d’attractivité économique entre Metz et Nancy. Bref, pour l’instant, le ciel reste bouché au-dessus de “Chambley Planet’air” qui est aujourd’hui, et c’est nouveau, sous la responsabilité directe de Philippe Richert depuis le débarquement brutal de la directrice de LorraineAirport, Françoise Herment, qui en assurait jusqu’ici la gestion.

Jean-Pierre COUR

Photo aérienne du site (© J-P COUR)

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